Ce matin, c’est grasse matinée avant de profiter de la journée. On prend le petit déjeuner et on se dit qu’on ne va pas manger ce midi mais grignoter car il est tard et surtout aujourd’hui c’est la journée cadeau d’anniversaire de Magali : visite de la Comuna 13 avec le « graffiti tour » et restaurant au Andrés Carne de Res.
Magali fait les courses en ligne. Je prépare le sac de la journée et range les courses, pendant que les gars font une partie de Warcraft.
On part à 12h30 pour retrouver Nico, notre guide, à San Javier, la station de métro pour accéder à la Comuna 13. Il y a un monde de fou et on est arrivés en avance. On cherche un lieu pour se poser et grignoter un morceau le temps d’attendre Nico.
On trouve une boulangerie… vraiment pas terrible mais le café est bon. On attend ensuite devant la station et Nico arrive.
Il parle super bien anglais et il nous partage déjà beaucoup d’informations. Il a toujours vécu dans la Comuna 13 et il a investi dans une formation pour apprendre l’anglais… chapeau.
On prend le bus pour rejoindre les escalators. Il y a toujours beaucoup de monde, il fait encore beau et on commence la visite.
Il nous raconte rapidement la vie d’avant, sa vie, où les dealers de drogues et les guerres de quartiers avec les frontières invisibles existaient. Il nous explique que le salaire de base en Colombie était de 250$/mois et que les gangs proposaient le double aux enfants juste pour surveiller un quartier et donner l’alerte si besoin. Grâce à cet argent, les jeunes pouvaient aider financièrement leur famille donc certains parents acceptaient cette situation.
Il nous parle aussi de « Pablo », qui n’est vraiment pas apprécié ici et il nous précise tout de suite qu’il n’a pas du tout contribué au quartier à part avoir apporté la drogue et la guerre des cartels. Certains mythes urbains le font passer pour un Robin de bois ce qui énerve la plupart des Colombiens.
Il nous raconte aussi que pour les filles, ça faisait classe d’être avec un gars d’un gang. C’était la mode d’être avec un bad boy, ce qui donnait un avantage de plus à ce statut. Après, l’espérance de vie dépassait rarement les 25 ans et la plupart sont aujourd’hui au cimetière.
Puis avec l’arrivée du mode de vie hip hop, une alternative s’est présentée. On pouvait être cool et respecté non plus en faisant des mauvaises choses mais grâce à la danse, au chant, à l’impro, au graff, et même gagner sa vie grâce en faisant des spectacles dans la rue pour les touristes. Et c’est ce qui s’est passé. Aujourd’hui, 90% des revenus de la comuna 13 est lié au tourisme et même s’il y a encore des trafics et de la déliquance, il y a une règle : « On ne touche pas aux touristes ».
Quand on demande à Nico si les habitants n’en ont pas marre d’avoir autant de touristes, il nous répond que c’est impossible parce que qu’ils se rappellent de ce qu’il y avant, la pauvreté, la violence et pour rien au monde ils ne reviendraient en arrière. Mais ça crée des situations ironiques, par exemple maintenant il peut acheter un vélo à son fils pour Noël mais les rues sont tellement bondées qu’il ne peut pas en faire.
Il nous amène dans les petites ruelles en évitant les rues principales avec tous les touristes. Il y a des graffitis partout, colorés et super joyeux. Parfois, ça représente un témoignage du passé comme la fameuse fresque mission Orion.
Une association qui vend des créations style Pop Art, au départ à base de vieux jouets recyclés, et qui reinjecte les bénéfices dans la comuna.
Il nous arrête souvent pour nous dire qu’on est sur une ancienne frontière invisible. C’est la ligne qu’il ne fallait pas passer au risque de se faire tuer par les gangs qui créaient ces frontières pour marquer leur quartier et conserver leurs business. C’est difficile d’imaginer cela car on se balade maintenant partout sans se sentir en danger.
Nico connaît tout le monde, il croise toujours des connaissances, il y a toujours des accolades, des sourires et de la joie.
Bien sûr, il nous parle aussi du problème des Farc et des paramilitaires qui ont fait beaucoup plus de dégâts que les narcotrafiquants. Et surtout des deux opérations militaires lors desquelles ont été tuées des centaines de personnes, dont plus de 300 civils, suite à l’ordre donné par le président : « Faites ce que vous devez faire pour nettoyer le quartier, quel qu’en soit le prix, vous avez 48 heures » (où à peu près ça). Un massacre qui reste dans les esprits des habitants de la Comuna 13.
Comment faire pour empêcher une rébellion ? En fait, ils ont tellement souffert des Farc, ou autres groupes révolutionnaires et des paramilitaires, que là ils profitent de ce moment de pause.
Mais aussi les militaires sont restés. A ce moment-là, Nico nous montre une maison où il y a un homme qui sort son linge, c’est un militaire. En fait, ils sont restés dans la Comuna 13 pour rassurer la population et ils vivent dans différentes maisons réparties dans différents quartiers.
Comme l’explique Nico, ça rassure surtout les familles et les anciens. Après, on croise aussi beaucoup de policiers (la version plutôt militaire et bien armée) un peu partout.
Donc, après la politique d’aménager les escalators et l’idée d’utiliser l’art pour travailler, la Comuna 13 est devenue tendance et attire des artistes du monde entier. Certains ont un mur dédié et ils doivent revenir tous les deux-trois ans pour refaire une nouvelle fresque mais ils peuvent aussi le transmettre à quelqu’un d’autre. C’es très demandé et les places sont chères.
Il nous fait aussi découvrir la glace à la mangue et fruit de la passion avec le citron et le sel, qu’on avait déjà dégusté, et nous fait découvrir des boutiques et galleries d’art des gens du quartier.
Arrivés en haut du plateau, il se met à pleuvoir et il nous demande si on veut s’arrêter ou si ça ne nous dérange pas d’être sous la pluie. Pour une fois, on n’a pas pris nos ponchos mais il ne fait pas froid donc on continue. La pluie s’intensifie mais on s’en fiche, on continue, ça donne une autre image du quartier qui s’est vidé.
De nombreuses rues sont aménagées avec des toboggans et Nico nous dit qu’il vient jouer avec son fils dans ces rues. Il nous dit aussi qu’il est divorcé de son épouse et que les relations en Colombie sont compliquées.
On arrive vers le bas du quartier et il nous raconte qu’il y avait des tanks qui passaient dans ces rues lors de l’opération Orion. Il nous présente le parc de la paix mais comme il le dit, il n’y a pas de parc, c’est plus un espace, une place, sans aménagement.
Il nous parle aussi d’un documentaire à voir qui parle de la vie à l’époque (pas si lointaine) de Medellin : « El Testigo » sur Netflix. La veille, Janer nous a conseillé le documentaire « La Sierra ». On va regarder tout ça.
On termine dans une boutique de produits street wear et on quitte Nico. Ca a été vraiment intéressant car on est passés dans des toutes petites rues, un vrai labyrinthe, où on voyait la vie des gens, des gars qui boivent des bières, papotent et des enfants qui jouent au foot dans une ruelle (ce qui était impossible il y a si peu de temps).
On décide de continuer à se balader dans le quartier. On trouve des galeries de street art, pop art… On adore vraiment : beaucoup de couleurs, de symboles et d’humour. Je trouve même un t-shirt avec écrit Medellin sans E (Mdellin)… j’adore.
Magali et les gars me disent qu’ils ont faim et on commence à sécher de la pluie donc on va au restaurant, le cadeau de Magali. C’est un restaurant qui m’a été conseillé par un de mes clients.
On descend tous les escalators et on prend un Uber pour rejoindre le restaurant qui est dans le quartier de Poblado. On en a pour 40 minutes de voiture et on arrive à 18H50 au restaurant.
On découvrir un univers… super coloré, de la musique, c’est immense et avec plein de symbole de Medellin avec des tables avec des noms de quartiers, des canapés pour s’asseoir et pour manger, des décorations colombiennes partout. Même la carte est super colorée et il y a un choix énorme.
Nos plats arrivent et on découvre un viande au poivre… certainement l’une des meilleures que j’ai mangée. Je ne pensais pas qu’on allait trouver d’aussi bonne viande après l’Argentine.
Il y a aussi un magicien qui vient nous voir et nous fait un tour de magie, ce qui est rigolo c’est que Sasha me faisait des tours de magie juste avant. On a bien rigolé.
On prend un dessert et ils sont à la hauteur des plats. Nael n’est pas fan de son dessert car il y a de l’arequipe (l’équivalent colombien du dulce de leche en Argentine). Nous on a aimé.
On reprend un Uber pour rentrer à l’appartement. On regarde un petit film et dodo.
Génial, on se croirait dans les petites ruelles avec vous…
Merci pour les tips des séries Netflix, ajoutées à ma liste de ce pas!
Quand Nico vous dit « les relations en Colombie sont compliquées » : que veux t-il dire par là ?
Besos,
Méli
Coucou,
Merci pour ton commentaire. 🙂
On pense qu’il parlait des relations hommes/femmes mais on n’a pas osé lui en demander plus…
Bisous.